40 ans de Ville et Banlieue, 40 ans de solutions locales : questions à Sylvie Thomas, Déléguée générale de l’Association
On n’a pas tous les jours 40 ans. C’est pourquoi l’Association Ville et Banlieue a décidé de fêter ce moment important avec toutes les personnes engagées ces dernières décennies sur les dossiers qui lui sont chers. L’occasion aussi de fêter ce qui est vécu au quotidien avec, au programme, deux journées d’échanges et de visites sur les dynamiques à l’œuvre en matière de politique de la ville. Pour en savoir plus sur cet événement mais aussi sur la vitalité de Ville et Banlieue, Parole d’élus est allé poser quelques questions à sa Déléguée Générale, Sylvie Thomas.
Paroles d’élus : Les membres de votre association se réunissent ces 18 et 19 octobre pour fêter les 40 ans. Comment se porte Ville et Banlieue ?
Sylvie Thomas : Cet anniversaire est un moment que nous préparons avec enthousiasme depuis plusieurs mois. Tous nos membres sont attendus à Lyon, ville dans laquelle est basée notre association depuis octobre 2017. Ce choix d’implantation, en région, s’explique par différentes raisons, la principale étant que nous y avons historiquement beaucoup d’adhérents.
Aujourd’hui au niveau national, nous rassemblons 75 membres, qui peuvent être des communes ou des EPCI. Ville et Banlieue a beau avoir 40 ans, nous continuions d’accueillir des nouvelles collectivités. Ces quatre dernières années, nous accueillons d’ailleurs comme nouveaux membres des grandes villes et même des Métropoles. C’est le cas par exemple avec Paris, adhérente depuis 2020 et Lyon depuis 2021. Cette année, Marseille, Grenoble et Bordeaux nous ont aussi rejoints. Mulhouse devrait en faire autant l’an prochain.
Tous ces nouveaux adhérents ont beaucoup de choses à apporter à la vie de l’association. Ils nous témoignent aussi de leur envie de bénéficier des atouts de l’association.
Paroles d’élus : Qu’apporte justement Ville et Banlieue à ses adhérents ?
Sylvie Thomas : Les actions que nous menons concernent principalement la politique de la ville. C’est pour nous le nerf de la guerre. Concrètement, Ville et Banlieue est à la fois une association représentative mais aussi un réseau d’échange et de soutien important pour les maires et les élus en charge de ces dossiers.
Grâce au nombre important d’adhérents et à notre réactivité, nous sommes devenus au fil du temps le point d’entrée des demandes au gouvernement. Nous travaillons de fait beaucoup avec le ministère de la Ville mais aussi directement avec la 1ère Ministre depuis les émeutes.
Mais nous avons aussi à cœur de travailler avec les autres associations d’élus. Cela se concrétise notamment dans une commission politique de la ville que nous pilotons en partenariat avec France urbaine et l’AMF.
L’animation du réseau est chez nous hebdomadaire. Elle se traduit très concrètement par des réunions en visio chaque mercredi matin. Celle-ci concerne selon les semaines, parfois seulement le conseil d’administration, parfois certains adhérents membres dans telle ou telle commission ou enfin tous les adhérents.
Autre exemple de ce que nous faisons, nous mettons en avant tous les mois les bonnes pratiques susceptibles d’être déclinés. Il y a beaucoup d’échanges et de retours d’expériences entre les membres.
Paroles d’élus : Le rejet inattendu et brutal du rapport Borloo en mai 2018 n’a donc pas mis fin à votre engagement et à votre motivation ?
Sylvie Thomas : Certainement pas même s’il est vrai que le rejet de ce plan n’a pas été très bien digéré par les élus. Ce rapport avait nécessité plus de six mois de travail de fond avec les élus locaux. Ça reste encore aujourd’hui une cicatrice mal refermée.
Mais les élus qui travaillent au sein de notre association Ville et banlieue sont des gens positifs et qui ont l’habitude de naviguer même à vent contraire. Si ce n’était pas le cas, cela ferait longtemps qu’ils seraient passés à autre chose. Malgré les tempêtes et les coups de vent, on reste motivé ! L’association depuis 40 ans, assure une continuité sur les politiques menées malgré les changements de gouvernements et de ministres inerrants à la vie démocratique.
Paroles d’élus : Quels sont les temps forts prévus pour ces 40 ans ?
Sylvie Thomas : C’est la métropole de Lyon qui nous accueillera au sein du conseil métropolitain ce 18 octobre. Pour cet événement, nous avons invité élus, actuels et anciens mais aussi des associations partenaires, experts et habitants. Bref, toutes les personnes avec qui nous travaillons depuis des années. Le mot d’ordre de cet événement, c’est « 40 ans de solutions locales ». Plus de 1000 personnes ont été invitées, ce qui a représenté pas mal de travail !
Pour les membres de notre bureau, il est important que ce rassemblement soit l’occasion de fêter ce que nous vivons au quotidien et ne soit pas seulement une rétrospective. Nous voulons redire en effet que c’est d’abord le local qui nourrit le national.
Dans cette idée, depuis plusieurs mois, nous avons demandé à chaque adhérent de mettre en avant un parrain ou une marraine par une vidéo. Nous avons ainsi récolté 40 capsules vidéo qui sont autant d’exemples de la vitalité de ces territoires. Elles sont diffusées depuis septembre sur les réseaux sociaux et seront aussi diffusées lors des 40 ans.
Deux tables rondes sont au programme de la matinée de mercredi. L’une d’elle sera l’occasion de dresser une rétrospective et d’analyser l’évolution de 40 ans de politique de la
Ville. Y interviendront Thibault Tellier qui est professeur des universités à l’IEP de Rennes et historien de la politique de la ville ; mais aussi Catherine Arenou qui est maire de Chanteloup-les-Vignes et 1ère vice-présidente de notre association ainsi que Jean-Louis Borloo, ancien ministre.
La seconde table ronde portera pour ainsi dire sur « demain ». Elle porte le titre « 40 ans, et maintenant ? ». Là encore, un large panel d’élus et d’experts interviendront à l’instar de Renaud Epstein, professeur de sociologie et spécialiste de la politique de la ville, de Marion Carrel, professeure de sociologie à l’université de Lille ou encore de Farid L’Haoua. Ce dernier est porte-parole de la Marche pour l’égalité et contre le racisme.
L’après-midi, 4 autres tables rondes sont prévues sur des thématiques chères à l’association comme la jeunesse, l’écologie ou encore l’emploi. La secrétaire d’État chargée de la Ville, Sabrina Agresti-Roubache sera présente et viendra clôturer cette journée. Puis nous serons accueillis par le Maire de Lyon Grégory Doucet à l’Hôtel de ville pour un moment convivial et festif. La journée du jeudi sera quant-à-elle marquée par notre Assemblée générale statutaire ainsi que différentes visites.
Paroles d’élus : Doit-on s’attendre à un appel de Lyon comme il y a eu un appel de Grigny en octobre 2017 ?
Sylvie Thomas : Ce que l’on appelle communément l’Appel de Grigny a eu un impact très fort sur la politique de la ville. Il faut se souvenir de la dimension fédératrice et historique de ce moment. Plus d’un millier de personnes, comprenant des élus, des parlementaires, des représentants associatifs et citoyens engagés dans la vie locale, s’étaient rassemblées pour parler d’une seule voix, défendre les quartiers populaires face aux coupes budgétaires et lancer une alerte au président de la République.
Mais si cet appel de Grigny a porté beaucoup de fruits, les élus déplorent encore aujourd’hui l’absence d’écoute de la part du gouvernement et le report de rendez-vous très important. La préparation des contrats de ville qui devait avoir lieu en ce moment a par exemple été reportée à fin mars 2024 sans plus d’explications. Ce n’est pas à moi d’annoncer s’il y aura ou non un appel de Lyon, mais je peux en tout cas vous affirmer que les membres de l’association ont beaucoup de choses à dire !