A Châteauneuf-le-Rouge, les ateliers numériques font le plein !
Sur le site internet de Châteauneuf-le-Rouge, commune de 2 172 habitants située dans les Bouches-du-Rhône, on peut lire l’encart suivant : « Un site éco-responsable pour une ville engagée ». En continuant, on découvre que la consommation de données est ainsi « réduite par 4 en moyenne ». Voici un exemple parmi tant d’autres, d’initiatives numériques mises en place par la municipalité ces dernières années.Et elles sont nombreuses ! Du déploiement de la fibre aux classes numériques en passant par la mise en place d’ateliers numériques, la commune est souvent pionnière dans le domaine. Pour en savoir plus justement sur ce dernier exemple, nous avons pu poser quelques questions à Elvire Laroche, Adjointe au Maire de Châteauneuf-le-Rouge.
Paroles d’élus : Quelle est la genèse des ateliers numériques proposés sur votre commune ? Pourquoi avoir décidé d’en organiser ?
Elvire Laroche : La Genèse remonte pour ainsi dire au déploiement de la fibre. En effet, avant de parler « usages », il faut avoir un réseau. Or notre commune de Châteauneuf-le-Rouge a souvent été pionnière dans le domaine du numérique. Nous sommes par exemple le premier village des Bouches–du–Rhône à avoir été entièrement fibré. Le déploiement a démarré chez nous concrètement dès 2016. Cette avance a permis à nos habitants d’être moins pénalisésen 2020, lors du confinement, puisque la commune était alors déjà fibrée à plus de 98%. Ce résultat est le fruit d’un partenariat fort avec les équipes d’Orange. Nous avons œuvré collectivement pour faire en sorte d’aller vite. Et sur le terrain, c’était un vrai travail de fourmi !
Nous savions que la fracture numérique, ce n’était pas seulement avoir accès à internet mais pendant le covid, les enjeux ont été particulièrement visibles. Parmi les autres dimensions, je pense bien évidemment au fait de pouvoir accéder à du matériel informatique ou à un smartphone. Et puis, il y a enfin le « savoir utiliser ». Et c’est justement pour cela que nous accueillons régulièrement dans notre médiathèque Fernand Boulan, des ateliers numériques. Ces derniers durent environ une heure et sont animés par un salarié d’Orange.
Paroles d’élus : Comment expliquez-vous cette avance sur les enjeux numériques ? Est-ce parce que l’on trouve des geeks au sein du conseil municipal ?
Elvire Laroche : Disons plutôt que nous avons pris les bonnes décisions au bon moment. Si nous faisons partie depuis 2017 de la Métropole de Marseille-Aix-en-Provence, nous étions rattachés auparavant au Pays d’Aix. Or, au sein de cette communauté d’agglomération, nous avions un débit internet vraiment très bas. Pour y remédier, les élus ont entrepris une montée en débit. De notre côté, connaissant l’état du réseau à l’époque sur notre commune, nous savions que c’était mettre un emplâtre sur une jambe de bois…
On constatait en effet que tout avançait très vite et que les besoins n’allaient qu’augmenter. Et surtout, nous étions convaincus d’une chose. C’est que proposer le Très Haut Débit dans nos villages était très important. C’est essentiel pour maintenir la vitalité même de nos territoires. Pour le télétravail bien évidemment qui aujourd’hui est une réalité mais aussi pour la santé, les démarches administratives ou plus largement l’attractivité.
Notre réflexion nous a donc orienté vers l’idée qu’il valait mieux renoncer à cette opération de court terme pour nous engager directement sur le déploiement de la fibre. Nous avons rencontré notre interlocuteur d’Orange en ce sens qui nous a suivi. Nous ne sommes pas des geeks mais il est vrai, à titre personnel, que je suis très impliquée sur le numérique. Je suis très curieuse et à l’affût des opportunités qui se profilent.
Paroles d’élus : Ce côté pionnier se retrouve donc aussi dans le domaine de la formation, à commencer par l’école ?
Elvire Laroche : En effet, outre les tableaux interactifs installés très tôt dans les classes, notre école est une des premières à avoir mis en place un dispositif de classe numérique mobile. Aujourd’hui, il existe des offres pour ainsi dire sur « étagère », qui sont « clé en mains ». Ce n’était pas le cas à l’époque. Avec notre informaticien, nous avons imaginé des caissons sur mesure permettant aisément de transporter les ordinateurs portables de classe en classe. Ce dispositif a ensuite évolué avec des jeux de tablettes.
Paroles d’élus : Avec les ateliers numériques, est-ce l’idée de pouvoir se former à n’importe quel âge ? Ces ateliers sont-ils intergénérationnels ?
Elvire Laroche : C’était en tout cas notre but au départ. Mais dans la pratique, il est difficile de trouver un créneau horaire compatible. En effet, avant de partir sur ce format d’atelier, nous avons essayé de créer un lien entre notre Club des Aînés et notre Espace Jeunes. L’idée était que la nouvelle génération passe une heure de temps en temps pour apprendre à nos anciens à envoyer un message à leurs petits enfants par exemple.
Dans les faits, c’est assez compliqué à mettre en place. Les personnes âgées préfèrent le début d’après-midi. Pour les jeunes, c’est le soir. Nous nous sommes à nouveau rapprochés d’Orange. En discutant de tout ce qui se faisait et des besoins spécifiques des différentes classes d’âge, nous avons opté pour ce format d’ateliers numériques autour de problématiques très concrètes. Aujourd’hui, nous sommes en discussion pour proposer un second atelier sur un autre créneau afin de cibler d’avantage les plus jeunes. Car pour eux aussi en effet, il y a un véritable enjeu.
Paroles d’élus : Les ateliers ont-ils trouvé tout de suite leur public ?
Elvire Laroche : Oui, et il n’a fallu pas beaucoup de temps. Pour le 1er atelier, il y avait trois inscrits. Dès le 2ème, ils étaient 6. Et depuis, les ateliers sont toujours complets. Si la population est au rendez-vous, c’est que les thématiques choisies répondent à un besoin. Cela va par exemple de « débuter avec son smartphone » à « comment sécuriser ses données personnelles » en passant par de la prévention pour « éviter les arnaques en ligne ». Un des gros atouts de ces ateliers, c’est de partir du matériel des participants. L’intervenant s’adapte aux différentes marques de smartphones par exemple. Même si à la base, c’est un atelier global, l’animateur fait pour ainsi dire du sur-mesure.
Et comme souvent, c’est en pratiquant qu’on assimile vraiment. Grâce à la récurrence des ateliers, un participant peut revenir au cours suivant avec une question ou un problème rencontré depuis dans sa pratique.
Paroles d’élus : L’animation de ces ateliers par un salarié d’un opérateur n’a donc pas été un frein au lancement des ateliers ?
Elvire Laroche : Bien au contraire. Je dirais même plutôt que les participants étaient rassurés d’avoir en face d’eux un formateur salarié d’un opérateur de téléphonie. Si vous vous intéressez au nucléaire, vous préférerez sans doute avoir en face de vous quelqu’un qui travaille dans le nucléaire plutôt qu’un théoricien…
Paroles d’élus : Lorsqu’on parle d’inclusion numérique, on entend toujours le chiffre de 13 millions. Ce chiffre qui, correspond au nombre de Français en difficulté avec le numérique, va-t-il selon vous diminuer au fil du temps ?
Elvire Laroche : Je vais vous faire une réponse de normande… Avec les nombreuses initiatives un peu partout en France, je pense que ce chiffre devrait naturellement se réduire. Pour autant, il y a quand même des incompatibilités évidentes.
Les évolutions technologiques vont très vite et il n’y a pas de raison de penser que cela va s’arrêter. Il faudra donc vraisemblablement se former tout au long de la vie. Et ce sera aussi le cas pour la nouvelle génération, bien que née dans un contexte d’ultra-connexion.
Un autre point qu’il ne faut pas sous-estimer, c’est la perte de dextérité liée à l’âge. Le corps humain a ses limites et passé 80 ans, le matériel n’est plus adapté.
Finalement, la question se pose aussi plus largement à la prise en compte du handicap. Plus une technologie prendra en compte l’usage numérique de tous, jeunes et anciens, handicapés ou non, via par exemple l’usage du vocal, moins il y aura de barrière numérique.Ce n’est pas un hasard si une entreprise américaine bien connue anticipe depuis longtemps le vieillissement de ses clients …