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    Entretien – Christophe Bouillon « Nous n’avons pas d’autres choix que d’être offensifs ! »

    À 18 mois des prochaines élections municipales et alors que le prochain gouvernement tarde à être connu, les élus locaux s’interrogent : Après les crises du covid et des prix de l’énergie, les maires pourront-ils finir leur mandat avec un minimum de sérénité ? Alors que rien n’est moins sûr, Paroles d’élus a pu s’entretenir avec Christophe Bouillon, le « patron » des petites villes de France. À l’occasion de son 23ème congrès, l’APVF avait donné rendez-vous à ses membres à Amboise ces 19 et 20 septembre.

    Paroles d’élus : Votre congrès, programmé initialement en juin, a dû être reporté à cause des élections législatives. Comment voyez-vous la situation en cette rentrée ? Quel est l’état d’esprit de ce congrès ?

    Christophe Bouillon : En cette rentrée, nous nous voulons offensifs, car nous n’avons pas d’autre choix. Nous sommes dans la dernière ligne droite avant la fin du mandat municipal. Les maires sont à la manœuvre et souhaitent remplir leurs obligations, tout en tenant les engagements pris auprès de leurs administrés. La demande des maires de l’APVF est simple : qu’on les laisse travailler sereinement et jusqu’au bout.

    Paroles d’élus : Le gouvernement brille aujourd’hui par son absence. Les problèmes s’accumulent et il n’y a toujours pas d’interlocuteur…

    Christophe Bouillon : Oui, cela fait maintenant 70 jours sans gouvernement, et cela commence à poser de vrais problèmes. Non seulement pour avancer sur des projets locaux, mais aussi pour les relations avec nos interlocuteurs économiques. Localement, les acteurs nous disent qu’ils ne peuvent pas rester plus longtemps dans cette situation d’incertitude.

    Nous craignons aussi que l’État puisse tailler dans nos finances. Ce serait une erreur, notamment en ce qui concerne la transition écologique, qui a un coût élevé, comme le disent les experts. Si nous arrêtons brutalement nos efforts dans ce domaine, nous n’atteindrons aucun des objectifs pour lesquels la France s’est engagée, notamment pour 2030, qui est dans seulement six ans.

    Paroles d’élus : On en revient toujours à la capacité d’investir de nos collectivités…

    Christophe Bouillon : Les collectivités locales jouent un rôle majeur dans cette transition. Si elles ne peuvent pas continuer à investir, il n’y aura pas d’investissement public en France. Pourtant, elles sont de bons gestionnaires, avec des budgets équilibrés. Mais il est vrai que leur capacité à investir est plus faible qu’au début du mandat. Mais malgré tout, elles restent le moteur principal de l’investissement public.

    On voit aussi des maires prêts à agir sur des questions comme le logement, mais ils ne sont pas aidés par l’État. Le recyclage du foncier est lent, les normes sont trop contraignantes. Pourtant, les élus continuent de travailler, car ils aiment leur mission. Nous avons vu une génération de 2020 très orientée vers la transition écologique. Celle de 2026 sera probablement plus tournée vers la solidarité et la gestion du vieillissement de la population. Il y a beaucoup d’idées et de talent dans nos territoires, et il ne faut pas brider cette énergie. »

    Paroles d’élus : Ce congrès est aussi l’occasion d’inviter un grand témoin. Quel est son rôle ?

    Christophe Bouillon : David Djaïz a accepté notre invitation. Il a écrit des ouvrages éclairants, notamment le dernier sur la « révolution obligée », qui porte sur la transition écologique. C’est une personne qui a exercé de hautes fonctions dans l’administration, et qui connaît bien les rouages de l’État, avec ses forces et ses faiblesses. Il a un regard neutre, inspiré et indépendant.

    Il est important pour nous d’être bousculés par des regards extérieurs. Nous ne voulons pas rester uniquement dans un dialogue entre maires. Nous avons besoin de perspectives extérieures pour progresser. C’est pourquoi nous avons fait venir des acteurs économiques lors d’autres événements.

    Paroles d’élus :  Pourquoi les maires se sentent-ils souvent bloqués dans leurs actions, comme s’ils devaient sans cesse retirer des grains de sable dans la machine administrative ?

    Christophe Bouillon : Les maires passent leur temps à retirer des grains de sable, car ils sont confrontés à des procédures complexes et des normes imposées qui freinent leurs projets. Parfois, il est difficile de mettre d’accord les services de l’État entre eux, car ils formulent des demandes contradictoires. Ces grains de sable accumulés fatiguent les élus. Nous aimerions que l’État prenne ses responsabilités et facilite les choses en simplifiant ces procédures. Prenez les normes, par exemple : elles coûtent plus de 2 milliards d’euros aux collectivités locales. Les maires s’arrachent les cheveux, car les projets qu’ils portent prennent un temps anormalement long à se concrétiser à cause de ces lourdeurs administratives.

     

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