Questions à Catherine La Dune, VP de la Région Nouvelle-Aquitaine
A la veille de la journée internationale des droits des femmes, la Région Nouvelle-Aquitaine organise une conférence-débat autour du thème « D’hier à aujourd’hui, femmes résistantes, femmes engagées » le jeudi 7 mars 2024 à partir de 9h30 à la MECA à Bordeaux. Pour en savoir plus, nous avons pu poser quelques questions à Catherine La Dune, Vice-Présidente du Conseil régional en charge du handicap, de l’égalité et de la lutte contre les discriminations.
Paroles d’élus : Pouvez-vous nous présenter l’événement qui s’organise le 7 mars prochain ? Et quels sont les objectifs ?
Catherine La Dune : Nous avons positionné cet événement en amont de la journée internationale des droits des femmes. Cette matinée se compose d’une conférence-débat autour du thème « D’hier à aujourd’hui, femmes résistantes, femmes engagées » ainsi que de la visite de l’exposition « Madeleine Riffaud. Résistante(s) » que l’on doit au dessinateur Jean-David Morvan.
L’un des enjeux était pour nous d’inscrire cette journée internationale dans son héritage historique. À nos yeux, c’est en effet très important de rappeler le combat de nombreuses femmes par le passé. Je pense notamment à l’impulsion de Clara Zetkin, figure historique du féminisme du début du XXème siècle. Il y a eu aussi bien évidemment les Suffragettes et toutes celles dont le nom et l’action ont été malheureusement oubliés. Ce temps-fort est bien évidemment l’occasion pour nous de parler de l’égalité mais aussi du passage de relais entre toutes ces femmes.
Paroles d’élus : La vie de Madeleine Riffaud est méconnue du grand public. Pourtant elle a eu de nombreux engagements. Pouvez-vous nous rappeler son parcours ?
Catherine La Dune : En effet, sa vie est faite de nombreux engagements et de nombreux combats. Au niveau culturel, elle a été poétesse reconnue. Ses poèmes furent publiés par Paul Éluard lui-même. Elle fut aussi un grand nom de la Résistance. S’est engagée à 16 ans. Elle fut arrêtée en 1944, torturée et condamnée à mort. Elle échappera au peloton d’exécution quelques minutes avant l’heure prévue. Après la guerre, elle fut journaliste, grand reporter de guerre en Algérie et au Vietnam. Et elle est aussi une grande figure féministe.
Paroles d’élus : Quelles personnalités participeront à cette conférence-débat ?
Catherine La Dune : Lors de cette matinée, la parole sera donnée à des personnalités issues du monde associatif, humanitaire, universitaire, sportif et culturel. Participeront également des jeunes femmes militantes dont celles du Conseil régional des jeunes de Nouvelle-Aquitaine. Ensemble, nous feront le point sur les principaux enjeux de l’engagement des femmes dans la société, qu’il soit local, national, transgénérationnel, associatif ou individuel.
Toutes ces femmes viennent d’horizons très différents. C’est bien évidemment un temps fédérateur pour nous mais aussi l’occasion de mettre en lumière tout ce qui est fait tout au long de l’année.
Paroles d’élus : Est-ce la première fois que la Région organise un événement de ce type ?
Catherine La Dune : C’est au contraire un rendez-vous récurent en région Nouvelle-Aquitaine. Chaque année, nous explorons un thème différent. Ce peut être l’engagement sociétal mais aussi en lien avec le milieu professionnel. L’an dernier, nous nous sommes interrogés par exemple sur la place des femmes dans les médias.
Paroles d’élus : Cette journée sera aussi l’occasion de la signature d’une convention d’engagement pour une communication publique sans stéréotype de sexe. Pouvez-vous nous en dire davantage sur cette démarche ?
Catherine La Dune : En effet, j’aurai l’honneur de signer avec Paola Bergs, secrétaire générale du Haut Conseil à l’Egalité, une convention d’engagement pour une communication publique sans stéréotype de sexe. Si la collectivité s’engage dans ce domaine c’est d’abord à cause d’un constat. Au quotidien, les exemples d’invisibilisation des femmes dans l’usage de la langue sont nombreux.
En matière de communication, peut-être encore davantage qu’ailleurs, nous nous devons, pouvoirs publics, d’être exemplaires. Que ce soit dans les discours, les colloques, les affiches, les supports numériques ou même les nominations des équipements et des rues, etc. Nous devons tout faire pour éviter de diffuser, voire de renforcer, des stéréotypes de sexe.
Cela passera aussi par une attention à la faible part des femmes parmi les personnes expertes invitées lors d’événements en tous genres.
En résumé, promouvoir une communication libérée des stéréotypes de sexe permet une ouverture du champ des possibles pour tous et toutes et contribue à promouvoir une société d’égalité. Et c’est le sens justement des dix recommandations contenues dans le Guide pratique pour une communication publique sans stéréotype de sexe.
Paroles d’élus : Pourquoi avoir choisi d’organiser cet événement à la MECA ?
Catherine La Dune : Rappelons tout d’abord que la MECA n’est pas un lieu comme les autres. Son nom est l’acronyme de Maison de l’économie créative et de la culture artistique en Nouvelle Aquitaine. C’est donc un lieu un peu moins solennel que le Conseil Régional. Il a aussi l’avantage d’être spacieux et très bien situé.
C’est un lieu important pour le rayonnement culturel de notre région. Or on sait que la culture est un domaine de partage des idées et un vecteur pour l’engagement. Les femmes sont au cœur de la création. Pour toutes ces raisons, la MECA nous semble le lieu approprié…
Paroles d’élus : Au-delà de cet événement, comment se concrétise votre délégation ?
Catherine La Dune : Les actions de notre collectivité sont de plusieurs types. Une des premières responsabilités de la Région Nouvelle-Aquitaine est de soutenir autant que possible le tissu associatif présent sur le territoire. Nous essayons de les accompagner au maximum dans tous les projets portés.
Nous avons aussi un rôle d’exemple et de mise en dynamique. Je pense par exemple très concrètement à la possibilité d’un congé menstruel que nous avons voté pour les agents de la collectivité.
Autre exemple, nous luttons la lutte contre la précarité mensuelle dans les lycées. Cela va plus loin que l’aide matérielle. C’est aussi en effet un moyen de faire un focus sur la santé des femmes en général. Cette action permet par ricochet de lutter contre le tabou des règles en ouvrant le dialogue dans les lycées avec les filles mais aussi les garçons. Dans certains établissements, des groupes de discussions ont été mis en place suite à cette action. C’est un espace où les jeunes filles peuvent parler plus facilement d’endométriose par exemple ou du consentement.
Paroles d’élus : La pensée de Simone de Beauvoir, « « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question » est-elle pour vous particulièrement d’actualité ?
Catherine La Dune : La pensée de Simone de Beauvoir est bien évidemment précieuse. Elle est pour chaque génération un précieux rappel. Rien n’est acquis. Il faut rester vigilent et surtout, tout le monde doit se sentir concerner, femmes comme hommes. Ces derniers ont des sœurs, des mères, des conjointes et des filles dont les droits peuvent être remis en cause.
Madeleine Riffaud dans une interview entendue récemment disait que si elle n’avait qu’un seul conseil à donner aux jeunes générations, c’était celui de s’engager. Il y a plein de façon de le faire. Ce peut être dans des associations, en politique, dans des syndicats car ces engagements sont un début d’action. C’est aussi œuvrer pour un monde plus en accord avec nos valeurs. Cela nous permet d’être sur le qui-vive.