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    Réseaux

    [Entretien] Questions à Richard Toper, Président du Cercle CREDO

    À l’occasion des États Généraux des RIP qui se déroulent aujourd’hui à Deauville, focus sur un acteur fédérateur de ce secteur ; le cercle CREDO. Depuis sa création en 1993, cette association nationale interprofessionnelle œuvre en effet tout autant à promouvoir le rôle et l’utilisation de la fibre optique dans les infrastructures et réseaux, qu’à accompagner l’apparition d’innovations liées à la fibre optique et au THD. Pour en savoir plus, Paroles d’élus a pu poser quelques questions à son Président, Richard Toper.

    Paroles d’élus : Qui sont les membres du cercle CREDO ? 

    Richard Toper :  Le Cercle CREDO regroupe et fédère l’ensemble des métiers et expertises de la technologie fibre optique, des réseaux à Très Haut Débit et des usages du numérique.  L’association réunit ainsi aujourd’hui près de 80 membres et une dizaine de partenaires. Concrètement, nos travaux portent donc à la fois sur les réseaux optiques des Opérateurs d’Importance Vitale mais aussi sur les réseaux FTTH déployés dans le cadre du Plan France très Haut Débit et sur les technologies que l’on peut regrouper sous le vocable de « nouveaux réseaux » avec par exemple la 5G et l’IoT.

    Paroles d’élus : Qu’est ce qui fait la singularité du cercle CREDO ?

    Richard Toper :  L’objectif de nos échanges est de réfléchir collectivement aux principes d’un bon déploiement et d’une utilisation intelligente de la fibre optique. Dit autrement, nous travaillons à faire comprendre au plus grand nombre, qu’à l’exemple du code de la route que nous suivons tous lorsque nous conduisons, il y a aussi pour le déploiement de la fibre, des bonnes et des mauvaises pratiques. Si nous ne voulons pas que ce soit le Far West, il faut élaborer un code commun.

    Paroles d’élus : Quel est l’objectif de l’expérience immersive en réalité virtuelle que vous avez développée ?

    Richard Toper :  Pour comprendre comment ça marche, il faut d’abord accepter d’y passer un peu de temps. L’enjeu est donc pour nous avant tout pédagogique. Nous travaillons à faire comprendre aux décideurs publics comment cette fibre fonctionne.  Et c’est loin d’être anodin car dans le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui, les personnes qui décident, pour de nombreuses raisons, ne vont pas forcément au fond des choses. Le casque de réalité virtuelle est un exemple d’initiatives prises par la Cercle CREDO. Grâce à lui et aux ateliers que nous animons, les élus comprennent ce que signifie intervenir en haut d’un poteau ou dans ce que l’on appelle une chambre. Cette connaissance de base est essentielle. Qui sait par exemple que pour mettre la 5G à la campagne il faut beaucoup de fibre optique ?

    Paroles d’élus : Grâce au plan France THD lancé il y a 10 ans, la France est dans le peloton de tête des pays fibrés. Pourtant, le secteur est face à des enjeux importants. Quel regard portez sur ces derniers ?

    Richard Toper : La seule règle qui a été admise lors du lancement du pan France THD, c’est de déployer très vite. C’est ce qui a été fait mais cela ne suffit pas. Il faut en effet que le réseau déployé fonctionne pendant des dizaines d’années, aussi bien sinon mieux que n’a pu le faire le réseau cuivre. Au début de ma carrière comme jeune ingénieur dans les télécoms, le bon vieux téléphone qui fonctionnait grâce au cuivre, c’était 2h de panne en 40 ans… nous avons un peu oublié cet ordre de grandeur.  Pourtant c’est primordial. Les réseaux THD sont aujourd’hui perçus par tous comme un outil de base pour la compétitivité économique de notre pays et des territoires. La Fibre est l’outil indispensable pour concrétiser la décentralisation. C’est grâce à elle par exemple, que vous pouvez avoir des ateliers Hermès implantés dans le Périgord.

    Alors comment expliquez la situation face à laquelle nous nous trouvons ? En France, c’est historique, c’est l’État qui donne les règles. Or ces dernières décennies, il s’est beaucoup allégé jusqu’à devenir un « État stratège et financier » mais il n’y a plus personne pour établir ces règles. C’est important qu’une organisation comme le Credo et d’autres essaient de faire émerger ces règles… Elles doivent être préparées collectivement pour que quelqu’un, en l’occurrence la gouvernance décide.

    Au CREDO, nous avons la conviction que le secteur doit au préalable partager une vision globale pour pouvoir définir ensuite les standards de qualité. Prenez l’exemple de la résilience. On peut faire un réseau qui ne va jamais tomber en panne pendant 100 ans ou un qui au contraire, tombera en panne tous les trois jours. Ce sont des décisions très concrètes à prendre et qui méritent d’être partagées. C’est à ce moment là uniquementque l’on pourra déterminer les moyens à affecter. Faut-il enterrer les câbles aériens ? C’est un moyen parmi d’autres mais d’abord, encore une fois, pensons vision commune. C’est là où la gouvernance est primordiale. Et pour cela, la mise en place des auditeurs labelisés peut nous aider…

    Paroles d’élus : Justement, le Cercle CREDO a officialisé durant ces EGRIP le lancement d’une labélisation. Pouvez-vous nous en dire plus ?

    Richard Toper :  Il s’agit d’une première en France. Ce label permettra, d’une part, d’harmoniser les pratiques d’audit des entreprises, et d’autre part de qualifier les compétences des intervenants des entreprises d’audit.C’est-à-dire que jusqu’à présent, il n’y a aucune note pour les réseaux qu’ils soient d’initiative privée ou publique. Pour le dire de façon un peu cavalière ; tout le monde fait ce qu’il veut. Les seules règles qui existent sont des règles financières. On parle du nombre de prises mais jamais de l’aspect qualitatif.

    Le risque de décalage entre les territoires aujourd’hui est grand. Certains territoires font plus attention que d’autres à la qualité des installations. Aussi, au bout d’un moment, cela se traduit par des vraies inégalités dans le service rendu.

    Cette initiative s’accorde parfaitement avec l’initiative de l’ANCT qui souhaite mettre en place des audits techniques et organisationnels afin de sécuriser les objectifs du Plan France Très Haut Débit. Je suis certain qu’elle permettra à tous les acteurs de réaliser un effort collectif orienté vers la qualité et la pérennité après avoir réussi ensemble des records de déploiement.