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    L'actu des associations

    Aux voeux de l’APVF avec son Président, Christophe Bouillon

    Si les vœux de janvier sont un rendez-vous incontournable, il faut avouer que certains débuts d’années ont été plus sereins. Après une année 2024 particulièrement compliquée pour les collectivités, l’exercice est a priori difficile… L’association des Petites Villes de France s’est malgré tout pliée à l’exercice en conviant au Musée de la Poste, ce mercredi 22 janvier, élus et partenaires. Paroles d’élus en a profité pour poser quelques questions à Christophe Bouillon, Président de l’APVF et Maire de Barentin.

    Paroles d’élus : Les vœux ne sont jamais un exercice simple, d’autant plus après une année 2024 particulièrement déconcertante… Le succès en salle de certains films a été pour vous l’occasion d’aborder plusieurs sujets qui vous tiennent à coeur et à l’APVF…

    Christophe Bouillon : Ce n’est pas qu’un exercice de style. Avec plus de 191 millions de spectateurs, nous avons retrouvé le goût du cinéma. Et c’est vrai que si les Français sont allés aussi nombreux au cinéma, ce qu’ils ont vu parle un peu de leur état d’esprit. On le voit, quand les Français se pressent dans les salles pour voir par exemple, Un petit truc en plus. On s’aperçoit que finalement, au moment où parfois on considère que les Français ont des passions tristes, il y a encore l’envie de garder ce lien avec l’intérêt général. L’envie de solidarité et de bienveillance. Mais les films disent aussi des choses sur nos émotions. Je pourrais prendre aussi l’exemple du Comte de Monte-Cristo, c’est une grande leçon de patience et de résilience.

    Paroles d’élus : En parlant de résilience justement, quel est l’état d’esprit des collectivités locales membres de l’APVF dans ce contexte de transitions sociale et environnementale inachevées ?

    Christophe Bouillon : Il est clair que, pour certaines collectivités, la situation demeure complexe. Il est important de souligner que nous devons continuer à agir en 2025 pour la transition écologique. Nous sommes les premiers artisans et bénéficiaires de tout ce qui permettra d’aller encore plus loin. C’est pourquoi j’ai profité de la présence à nos voeux de Françoise Gatel, Ministre de la Ruralité, pour rappeler qu’il est primordial de garantir suffisamment de moyens pour poursuivre nos efforts. 

    Paroles d’élus : Vous avez également abordé  la question de l’assurabilité des collectivités locales. Quel rôle pour l’État face à cette problématique ?

    Christophe Bouillon : Le système de financement des collectivités, en particulier sur les questions d’assurance, nécessite une réflexion plus poussée. Très nombreuses sont les  collectivités se retrouvant dans des situations où elles ne peuvent pas assurer leurs bâtiments ou équipements essentiels. Et il faut décider rapidement. L’assurance des collectivités locales est pour nous une question essentielle. Nous avons vu, encore en fin d’année, des collectivités qui n’ont pas pu continuer à opérer la collecte des déchets parce que les véhicules n’étaient pas assurés. Et imaginez dans notre pays, aujourd’hui, que des écoles, des équipements sportifs ou des équipements administratifs ne puissent pas être assurés. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas bien.

    Il faut un droit à l’assurance pour les collectivités locales. Plusieurs pistes sont possibles. Par exemple, pourquoi ne pas envisager une révision des conditions d’appel d’offres pour les assurances, en prenant en compte les réalités spécifiques des collectivités locales ? Une réassurance pourrait aussi être envisagée pour soutenir ces collectivités face à des risques systématiques, notamment ceux liés au changement climatique. Nous devons penser à des solutions innovantes pour garantir la continuité des services publics.

    Paroles d’élus : La question de la santé était un sujet important de vos dernières rencontres de l’APVF à Amboise. Quels sont vos sentiments sur l’état actuel de l’offre de soins ?

    Christophe Bouillon : C’est une question fondamentale. Je vois fleurir sur les territoires des initiatives comme les CPTS. Ces communautés professionnelles territoriales de santé regroupent les professionnels d’un même territoire qui souhaitent s’organiser ; à leur initiative ; autour d’un projet de santé pour répondre à des problématiques communes. Force est de constater que de nombreux citoyens rencontrent encore des difficultés à accéder à un médecin traitant. Il n’est pas possible qu’un Français sur 10 n’ait pas de médecin traitant. Il est donc nécessaire de mettre sur la table l’idée d’un droit opposable au médecin traitant, à l’image du droit au logement. Cela permettrait de garantir un accès aux soins pour tous, y compris dans nos territoires les plus éloignés.

    Paroles d’élus : Les dossiers semblent s’accumuler sur le bureau des ministres. Celui du logement justement n’a que très peu avancé…

    Christophe Bouillon : En ce qui concerne le logement, nous voyons de plus en plus de citoyens en difficulté. Il faut absolument donner de l’oxygène aux bailleurs sociaux pour qu’ils puissent accompagner les projets, par exemple en revenant sur la Réduction de loyer de solidarité (RLS). Sur la question de la fiscalité, nous avons travaillé à l’APVF, sur la décentralisation des mesures fiscales, notamment la défiscalisation des installations économiques. Cependant, le vrai défi à venir, c’est celui du foncier. Là encore, je plaide pour que les terrains mis à disposition pour des activités économiques dans les quartiers prioritaires ne soient pas pris en compte dans le calcul du ZAN. Il faut cesser d’aborder le ZAN avec un calculette à la main. C’est un enjeu majeur pour garantir le développement économique local.

    Paroles d’élus : Vous êtes président de l’ANCT. D’aucuns dénoncent le nombre trop important d’agences de l’État en France. Qu’en pensez-vous ?

    Christophe Bouillon : Attention à ne pas confondre le symptôme avec la maladie elle-même. Ce dont nous souffrons, le plus, ce n’est pas l’excès d’administration, c’est l’excès de normes. Ce n’est pas nous qui le disons. Je me souviens, il y a quelque temps de cela, lorsque le Sénat avait pris la décision d’un choc de simplification. Les chiffres étaient éloquents. Lorsqu’on dit que l’excès de normes, l’enchevêtrement, représente 4 points du PIB, soit 95 milliards, je pense qu’il y a en la matière sans doute à s’intéresser à ceux qui produisent les normes. Ce ne sont pas les administrations elles-mêmes, ni les élus locaux que nous sommes.

    Je pense que, là encore, il faut qu’on fasse un effort partagé, non pas pour réduire l’administration dans sa capacité à faire et à bien faire, mais plutôt les normes qui s’imposent.

    Paroles d’élus : Les procédures administratives sont-elles plus longues en France qu’ailleurs ?

    Christophe Bouillon : C’est un fait : les procédures dans notre pays sont plus longues. Néanmoins, on a été capable, dans un temps record, de reconstruire Notre-Dame parce qu’il y avait une loi d’exception, parce qu’on a dérogé à certaines règles. On a été capable de faire un village olympique dans un temps record grâce à une loi d’exception. Je pense qu’il faut que la loi d’exception devienne la règle…

    Paroles d’élus : Quelles sont les priorités pour les collectivités locales en matière de simplification ?

    Christophe Bouillon : Nous serions bien inspirés, lorsqu’une proposition arrive au Parlement et a pour conséquence d’imposer des charges supplémentaires aux collectivités, de poser une condition, à l’image de ce qui se passe pour l’État. Nous connaissons aujourd’hui l’obligation d’études d’impact, mais il faut que ces études prennent en considération les conséquences que peuvent avoir telle ou telle décision sur les collectivités locales elles-mêmes. Le message que nous voulons adresser est clair : Laissez-nous tranquilles. Nous devons avoir le pouvoir d’agir dans le sens commun pour l’intérêt général. C’est cette énergie qui nous anime, et nous espérons tout simplement que l’année 2025 ne sera pas un mauvais remake de l’année 2024.

    Retrouvez les vidéos du dernier congrès de l’APVF en cliquant ici.