Denis Thuriot : « L’innovation, c’est à personne, donc c’est à tout le monde »

Retour sur un autre temps fort du Live Paroles d’élus qui s’est tenu début Juillet à Libourne, lors du congrès de Villes de France . À cette occasion, le maire de Nevers nous a détaillé sa stratégie numérique. Entre transformation urbaine et défis de cybersécurité, Denis Thuriot prône une approche pragmatique de l’innovation territoriale.
Une transformation numérique au service du développement territorial
Denis Thuriot assume pleinement ses choix. Le maire de Nevers a fait de l’innovation son fer de lance depuis 2014. « Je suis parti du principe que j’avais besoin de redévelopper un territoire », explique-t-il. La ville possède certes de l’industrie automobile et des forêts. Mais cela ne suffit plus.
L’édile a donc misé sur le numérique. Une ancienne caserne abandonnée depuis quinze ans est donc devenue un hub numérique. Grâce à cette requalification, Nevers dispose désormais du plus grand campus connecté de France. Cette stratégie démontre qu’une ville médiane « peut jouer dans la cour des grands ».
Le développement s’opère à l’échelle de l’agglomération. Denis Thuriot préside Nevers Agglomération. Ainsi, nous explique-t-il, « les petites communes rurales bénéficient aussi de cette dynamique. Le partage des moyens permet d’emmener tous les territoires ».
L’inclusion numérique, priorité absolue
Avant de développer l’innovation, Denis Thuriot s’est attaqué à la fracture numérique. « La première innovation que j’ai faite, c’est créer des gens qui accompagnent au numérique », souligne-t-il. Ces conseillers numériques ont été déployés avant même que l’État n’en mette à disposition.
L’action cible prioritairement les publics fragiles. Le centre d’action sociale aide ceux qui ont du mal avec la dématérialisation. Notamment pour les démarches avec la CAF ou la CPAM. Cette approche évite les gadgets. Elle contribue concrètement à réduire l’écart entre ceux qui savent et ceux qui ne savent pas.
La 5G, un atout économique et écologique assumé
Denis Thuriot défend fermement le déploiement de la 5G. « Aujourd’hui, quand une entreprise veut s’installer, si vous n’avez pas la 5G, elle va voir ailleurs », insiste-t-il. Les opérateurs visaient d’abord les grandes métropoles. Puis, comme beaucoup les ont refusées, ils se sont tournés vers des villes comme Nevers.
Le maire critique au passage certaines positions écologistes. À utilisation équivalente, la 5G consomme moins que la 4G tout en nuançant : »Certes, elle offre plus de possibilités. Donc si on les développe toutes, effectivement on consomme davantage. Mais il faut se maîtriser ».
Nevers prouve qu’innovation et environnement ne sont pas incompatibles. La ville a d’ailleurs replanté 10 000 arbres en dix ans. Elle est aussi la première de France à obtenir le label numérique responsable. « Ce sont les nouvelles technologies qui servent le développement durable », martèle Denis Thuriot.
Cybersécurité et intelligence artificielle : les défis de demain
Le maire identifie deux enjeux majeurs. D’abord, la cybersécurité qui concerne désormais tout le monde. En 2020, Denis Thuriot a créé un poste d’élu dédié. Un budget de 250 000 euros sur trois ans a été voté pour la ville.
Ensuite, l’intelligence artificielle bienévidemment. « Il faut absolument garder la maîtrise », alerte l’édile. Sinon, nous risquons de rentrer dans une société uniforme. L’IA doit rester un outil. Elle peut aider sur les tâches répétitives. Mais elle doit libérer du temps pour que les agents apportent une plus-value humaine.
Denis Thuriot reconnaît les difficultés. Certains agents utilisent l’IA en cachant cela par peur d’être remplacés. Pourtant, comme l’informatique à l’époque, elle peut simplifier le travail. L’enjeu reste de s’en emparer et de la maîtriser.
Un message aux collectivités : agir maintenant
Le maire de Nevers interpelle ses homologues. L’investissement dans la cyber et l’IA n’est pas un budget perdu. « Si vous êtes attaqués par de l’intelligence artificielle, il faut vous défendre par de l’intelligence artificielle », prévient-il. Le coût sera toujours inférieur à un blocage de quinze jours.
L’exemple d’Angers, ville innovante mais victime d’une cyberattaque, illustre cette vulnérabilité. Denis Thuriot comprend les réticences budgétaires. Néanmoins, il faut porter ces nouveaux enjeux. Et rassurer les citoyens sur le respect de leurs données.
L’ambition pour 2030 reste pragmatique : « Poursuivre ce qui marche et changer ce qui ne marche pas. » Car pour Denis Thuriot, le premier parti d’un maire, c’est le bon sens.