[Lecture estivale#2] L’Université d’été des déserts numériques et médicaux, 4 questions à Guillaume de Durat
Encore au bureau ou bien en vacances, profitons de ces prochaines semaines pour prendre le temps de revenir sur les dossiers qui feront l’actualité de la rentrée. Les 20 et 21 septembre prochain auront lieu la 2ème édition de l’Université d’été des Déserts Médicaux et numériques au Château d’Auzon, à la frontière entre l’Allier (Région Auvergne Rhône-Alpes) et la Nièvre (Région Bourgogne Franche-Comté). Pour en savoir plus sur cet évènement, nous sommes allés poser quelques questions à Guillaume de Durat, e-influenceur en santé et initiateur de cette manifestation. Pour lui, une chose est sûre : « il n’est pas possible de résoudre la problématique des déserts médicaux par la télémédecine et les objets connectés s’il subsiste un désert numérique ».
Paroles d’Elus – Comment vous est venue l’idée d’organiser une université d’été consacrée aux déserts médicaux ?
Guillaume de Durat – L’idée est partie lors d’un week-end dans le lieu même où se déroule l’université d’été. J’y recevais notamment des amis, médecins, influenceurs de la santé ou tout simplement patients potentiels. Le constat très rapidement fait que nous n’aurions pas de connexion pendant ce séjour. Nos échanges nous amènent à cette idée qu’il était nécessaire aujourd’hui de « superposer les cartes ». En effet, malgré de formidable progrès pour la télémédecine par exemple, son déploiement à grande échelle serait aujourd’hui un échec dans de nombreux territoires souffrant également d’une insuffisance en couverture réseau. De là est venue l’idée de créer un temps fort afin d’échanger sur ce que je nomme parfois de « double peine ».
PdE – De quoi a-t-il été question lors de la précédente édition ?
GdD – En 2017, l’Université d’été n’avait pas été pensée pour devenir quelque chose de récurent. L’idée était plutôt de mettre la problématique de déserts médicaux aux cœurs des débats. Ces deux jours nous ont permis d’entendre tout d’abord, la voix de professionnels de santé exerçant aux quatres coins de la France et qui n’avaient pas l’habitude de parler, ni d’être entendus. Nous avons pu également relever les besoins des collectivités locales et des établissements de santé en matière d’aide, assistance et de conseil. Autre point souvent oublié, la précédente édition nous a fait remarquer que la diffusion de l’information par exemple des professionnels de santé ou des associations de patients, était fortement impactée par le mauvais maillage du numérique.
PdE – Que s’est-il passé depuis 2017 ? Pourquoi organisez-vous une 2ème édition ?
GdD – L’Université d’été a permis de lancer la première saisine d’une pétition citoyenne par le Conseil économique social et environnemental. Celui-ci a rendu un avis sur les déserts médicaux en décembre 2017, remis à Madame Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé.
Parallèlement, on voit que le manque patent de professionnels de santé est devenu une des premières préoccupations de nos concitoyens. Certaines initiatives sont lancées comme par exemple la création de maisons de santé, sans pour autant être une réponse toujours pertinente face à la pénurie dans laquelle nous nous trouvons. La télémédecine et donc de facto, la couverture mobile et THD de tout le territoire, est notre seule chance. La France veut opérer un virage ambulatoire mais à mon sens, elle ne s’en offre pas les moyens. Peut-on prendre rendez-vous avec son médecin ? Appeler les pompiers pour une urgence ? Utiliser des applications mobiles de santé ou des objets connectés de santé ? Se faire hospitaliser à domicile ? Voilà autant de questions malheureusement toujours d’actualité et qui nous poussent à organiser une seconde édition.
PdE – De quoi sera-t-il question lors de la prochaine édition ?
GdD – La première journée sera orientée technologies et territoires, la seconde dédiée à une approche médicale, usager, patient. Nous espérons ainsi apporter une nouvelle pierre aux réflexions publiques mais également mettre en avant des solutions adaptées aux besoins du terrain. Nous consacrerons une partie du programme à l’acculturation et à l’appropriation des technologies ainsi que de plusieurs sujets qui aujourd’hui nous alertent comme l’interopérabilité et la compatibilité des dossiers patients hospitaliers informatisés avec le DMP. Nous parlerons également à la 5G. En effet, alors que les maladies chroniques représentent près de 10 millions de personnes en France, elles sont la cible idéale pour les objets connectés en e-santé. Ces derniers permettent de surveiller au plus près et de transmettre l’état de santé des patients… Mais là encore, sans réseau, l’e-santé ne peut pas se développer.
Des startups aux opérateurs de réseaux, des élus aux médecins, des représentants des patients aux pouvoirs publics, cette nouvelle édition se veut toute à la fois un espace de réflexion et de co-construction. Plus que de solutions où d’idées, les déserts médicaux et numériques d’aujourd’hui manquent d’abord et avant tout d’une vision transversale.